Une étude sur les relations entre bactéries du lait maternel, HMO et croissance du nourrisson
Qu’il est loin le temps où l’on pensait que le lait maternel était stérile, et qu’il ne contenait que des substances nutritives ... Aujourd’hui, il est bien démontré que les constituants microbiens et bioactifs du lait maternel peuvent moduler la composition corporelle ainsi que le développement de l’immunité du nourrisson, pendant les premiers mois après l'accouchement, ce qui affectera sa programmation métabolique et sa santé à l’âge adulte.
Une étude australo-californienne analyse en profondeur les relations entre les bactéries du lait maternel, les HMO et la croissance de nourrissons allaités exclusivement. Elle y documente en plus les associations entre la composition corporelle de la mère et des composants du lait maternel.
Cette étude explore ainsi le lien entre IMC de la mère et IMC du bébé où bactéries du lait maternel et HMO semblent jouer un rôle important. Nous y consacrerons 2 articles, ce premier étant dédié au rôle de régulation pondérale des HMO.
Des HMO particuliers influencent la croissance du nourrisson allaité
Les facteurs maternels, notamment la génétique, l'âge, l'origine ethnique et l'IMC avant la grossesse, sont connus pour influencer la composition en HMO du lait maternel. Cependant, de nouvelles observations entre la composition corporelle de la mère et les concentrations en HMO pendant la période d'allaitement maternel exclusif viennent enrichir ce débat.
Les auteurs ont en effet enregistré des associations positives entre le poids maternel, l'IMC, l’index de masse maigre et les concentrations en HMO 2’FL et LNH. D’autres différences ont aussi été enregistrées, mais dépendent du statut sécréteur ou non de la mère.
Après avoir étudié la composition du lait maternel, les auteurs se sont ensuite attachés à mesurer l’absorption quantitative des différents HMO par les nourrissons et ont montré des relations positives entre certains d’entre eux et la croissance des bébés. Ils ont ainsi montré une relation positive entre la concentration en DFLNH et le poids, la taille et la masse maigre : plus le nourrisson absorbe du DFLNH, plus il sera grand et avec une masse de préférence maigre. D’autres HMO comme le FLNH, LNnT et LNFP III étaient négativement associés aux mesures d'adiposité : plus ils sont absorbés, moins le nourrisson est gros.
Des résultats plus précis permis par cette étude
Des études précédentes ont largement contribué à l'hypothèse selon laquelle les HMO sont liés à la croissance du nourrisson, directement et/ou à travers leur action sur le microbiote intestinal du nourrisson. Aujourd’hui, la vérité est en marche mais l’équation n’est pas encore tout à fait résolue.
En effet, les résultats observés dans l’étude peuvent être dus à des variations dans les concentrations individuelles des HMO. Par exemple, la concentration en DFLNH était deux fois plus élevée dans cette étude australo-californienne que dans de précédentes études. De plus, le protocole utilisé a pu influencer les résultats : les mesures utilisées dans cette étude apportent des informations sur la quantité réellement ingérée par le nourrisson et ont permis une meilleure compréhension des relations entre les HMO et la croissance du nourrisson, par rapport à la seule utilisation des concentrations en HMO du lait maternel, qui est souvent utilisée dans d’autres études.
Malgré cette complexité, des HMO spécifiques tels que DFLNH et LNnT semblent jouer un rôle protecteur en régulant l'accumulation de graisse, protégeant ainsi potentiellement les nourrissons de l'obésité plus tard dans la vie.
Conclusion
Les conclusions de cette étude consolident les relations entre les HMO et la croissance du nourrisson, confirmant que les apports en HMO peuvent avoir une influence significative sur la croissance du nourrisson et le développement de sa composition corporelle au cours des trois premiers mois de la vie. Ils soulignent l'importance des apports journaliers, et la complexité de l’implication de certains HMO, qui diffèrent selon statut de sécréteur maternel.
Sources
Ref: Human Milk Oligosaccharides and Bacterial Profile Modulate Infant Body Composition during Exclusive Breastfeeding, A S. Cheema et al. Int. J. Mol. Sci. 2022, 23, 2865. https://doi.org/10.3390/ijms23052865